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Coup
de projecteur sur le
burloir,
un instrument couramment utilisé à Laprugne au 19ème siècle,
et qui a depuis complètement disparu, y compris des mémoires. Laissons
la plume à Fr Perrot qui en 1891, lui consacre un article publié dans le
tome V de la Revue des Traditions Populaires. Bien qu’emporté parfois
par son lyrisme et une imagination pour le moins féconde, Fr Perrot décrit
fidèlement cet instrument de communication, l’ancêtre du téléphone
portable. Remarque : le nom burloir dériverait-il du verbe « beurler » qui en patois signifie hurler, crier très fort ? |
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C’est
au canton du Mayet de Montagne qu’appartiennent ces pays pittoresques, où
les traditions et les légendes se sont conservées, comme le menhir sur
lequel Saint Martin a scellé la croix. C’est là que se retrouvent les
fontaines et les bois sacrés, le cercle de pierres (Ré-mur-Seint), le Ré
de Sol, le mont Lune, les pierres du Jo, la pierre et la grotte des Fées,
la pierre du Jour, les palets de Gargantua, la croix du Sun. Chaque
village possède ses traditions et chaque pierre conserve ses légendes :
les fées y sont dans leur empire, la montagne bourbonnaise est encore
toute mystérieuse ; lo fadas se cachent dans les bois et dans les
rochers. |
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Le
pays est pauvre et l’herbe est courte, et quand le pâtre veut
rassembler son troupeau dispersé pour redescendre à la chaumière, il ne
pourrait crier assez fort, mais il a façonné un instrument sur le modèle
d’un ancien tout vermoulu, c’est une trompe de plus d’un pied de
long et de la grosseur du bras : il a creusé avec son couteau une
branche courbe de fayard (hêtre), il l’a percée avec un fer rouge, et
avec ce même fer, il a tracé un monogramme, sa propriété, et des
ornements ; avec cette trompe, qu’il nomme burloir, il appelle ses
animaux habitués à sa voix, et lentement, ils descendent ces pics et ces
pentes rapides aux accents du chant traditionnel « la Saint Jean ». |
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Mais
le principal office du burloir est d’appeler aux offices de la
Semaine-Sainte les habitants de la commune que les cloches muettes de l’église
n'avertissent plus; les
gars montent, au clocher et sur un thème convenu, ils annoncent
ensemble l’heure des offices. Par
extension, le burloir sert aussi à un très singulier usage, notamment
quand une veuve semble se remarier un peu tôt, le charivari des burloirs
ne manque pas de poursuivre le couple trop empressé de la mairie au
domicile conjugal, et il est plus de minuit que ce concert baroque n'est
pas terminé.
Plus
anciennement, on employait le burloir pour annoncer le rassemblement de la
population au chef-lieu du village pour la lecture des édits royaux, ou
pour avertir d'un danger, car le son des cloches était insuffisant,
tandis que celui des burloirs se fait entendre à de très grandes
distances. C'est
surtout à la Pruyne, l’une des dernières communes perdues dans la
montagne bourbonnaise, que le burloir est le plus généralement employé. L'un
de ces instruments est déposé au musée ethnographique du Trocadéro à
Paris, dans la vitrine spécialement affectée au Bourbonnais. |
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Dans leur livre le Bourbonnais publié en 1954, A Bernard et C Gagnon mentionnent également le burloir : Certains objets sont fort intéressants pour le folklore. Un porte-voix particulier à la Montagne Bourbonnaise, le burloir, servait à appeler de vallée en vallée. C’était une sorte de trompette en bois de hêtre (fayard) |
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De nos jours, le burloir pourtant bien pratique et peu onéreux (pas d’abonnement, pas de taxe de communication, pas de zone d’ombre) a disparu, laissant la place aux téléphones portables, bref les « beurlées » ont laissé la place aux SMS, et les grands fayards aux antennes-relais, qu’on s’en félicite ou qu’on le déplore. |
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